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Photo du rédacteurAlain THIREL-DAILLY

Récit de vie : Henri Thirel 1915-1920.

Le 18 mai 1915, j’ai rendu à visite à mon grand-père, Henri Thirel, dans son cantonnement de Lucheux, dans la Somme. Il y stationnait alors avec la 13e section de munitions d’artillerie dans laquelle il servait. Lire ou relire ce RDVAncestral en cliquant ici.

Le répit sera de courte durée et le rythme des ravitaillements en munitions reprend. C’est maintenant dans le Pas-de-Calais, à l’ouest d’Arras dans le secteur de Saint-Pol-sur-Ternoise, que la section alimente les troupes de l’Entente qui lancent quelques offensives.

Voilà maintenant un an que les soldats en guerre n’ont pu revoir leurs familles. Des mouvements se font jour parmi les hommes du rang pour obtenir des permissions auxquelles seuls quelques officiers ont droit. C’est en juillet 1915 que Joffre ouvre cette possibilité qui met de longs mois pour être effective avant même de se généraliser.

Nous ne savons pas si Henri en a bénéficié, mais nous le retrouvons le 16 novembre 1915 alors qu'il est affecté aux Forges et Laminoirs de Breteuil (Eure), son lieu de domicile. Il y travaille désormais pour la Défense Nationale, par décision ministérielle n°03821 du 3 novembre 1915. Le voilà de retour sur ses terres et proche des siens.

Loin du front, dix-huit mois plus tard au printemps 17, Henri sait-il qu’une nouvelle stratégie d’attaque frontale, après l’enlisement de la guerre de position, est en cours d’élaboration ? La France a en effet subi de lourds échecs lors des Batailles de Verdun et de la Somme. Des signes de lassitude et de découragement se font jour dans les régiments. Le Général Nivelle élabore ce qui doit être la dernière attaque frontale devant mener à la victoire finale.

La Bataille du Chemin des Dames, conduite entre le début mai et la fin juin 1917, se solde par un nouvel échec cruel des armées françaises avec 200.000 morts à l’issue des deux mois de combats. Les échos de la révolte qui gronde sont-ils arrivés jusqu’à Breteuil alors que se développent de fréquentes mutineries au sein même de l’Armée française et, d’ailleurs, des armées étrangères ?



Les pertes ont été lourdes en homme et il faut envoyer de nouvelles forces au front pour suppléer… Le 4 juillet 1917, Henri est affecté au 39e RI. Artilleur, c’est maintenant dans l’Infanterie qu’il va servir. Il rejoint son bataillon qui rejoint le secteur du Chemin des Dames, devant Cerny-en-Laonnois, pour relever les rangs décimés du 5e RI.

Les généraux Nivelle et Mangin sont limogés et c’est Pétain qui prend le commandement des opérations dans ce secteur. Au cours des mois de juillet et août, avec son régiment, Henri découvre ce qu’est la vie dans les tranchées. Attaques et contre-attaques s’enchaînent dans la tranchée Waldeck et dans le boyau du Foc. Les tirs de « minens » allemands font de lourds dégâts.

Fin août, après quelques jours de repos à Mont-Notre-Dame, c’est dans le secteur d’Hurtebise, dans les pentes de l’Ailette et aux crêtes de Vassogne que les combats se portent. Le régiment est relevé le 15 septembre puis entre dans le secteur de la Harazée, en Argonne, le 19 novembre où il effectue quelques incursions dans les lignes ennemies. L’objectif est d’éviter l’avancée des Allemands et d’épauler Verdun avant une dernière offensive.

Mais Henri, gravement malade, est renvoyé dans ses foyers en Normandie. Le 24 mai 1918, la Commission ad hoc de Caen prononce sa réforme pour « tuberculose pulmonaire bilatérale en évolution, crachats bacillifères, très mauvais état général, affection présumée aggravée en service ».

De retour à Breteuil, il n’a sans doute pas de grandes forces pour travailler à l’atelier et doit toujours compter sur les plus anciens et fidèles de ses employés pour faire tourner celui-ci. Avec la fin du conflit et la reconstruction du pays, une relance de l’activité est à prévoir et il va falloir mettre les bouchées doubles. Henri lance, en août 1919, une annonce pour le recrutement de deux ouvriers charrons.

Madeleine son épouse, inquiète pour sa santé, s’active. Elle a la chance, par le biais de Mme Saxe, veuve d'un pharmacien bretolien, de pouvoir être mise en relation avec le fils de cette dernière. Médecin aide major 1ère classe de l’Armée, né à BRETEUIL, Maurice Saxe a le même âge qu’Henri. Durant le conflit il s'est distingué, dans ses missions de santé et a déjà été décoré de la Croix de guerre. À sa mise en congés de démobilisation, il s’installe à Paris, 25 rue Monge, où il prépare l’ouverture d’un dispensaire de dépistage, de diagnostic et d’éducation prophylactique des malades et de leurs familles à domicile avec la Ville de Paris. Ces dispensaires, pièces maîtresses de l’armement antituberculeux, obligatoires dans chaque commune, peinent à se mettre en place. Henri a la chance d’y avoir accès.

Le 11 janvier 1920, Henri reçoit un courrier du Dr Saxe : « Votre lettre m’a fait plaisir et j’espère que le mieux que vous me signalez s’est maintenu et accentué. [-] Quant à votre intestin, il faut bien s’attendre à avoir, encore de temps à autre, des soucis de ce côté-là [-] de même que vos douleurs des reins, ce n’est pas là un point inquiétant ». Il lui conseille de prendre de l’iode dans du lait et d’augmenter les doses progressivement. Quant au problème plus grave de la tuberculose, il lui annonce l’envoi de 12 ampoules de vaccin à prendre tous les 4 jours, en deux séries de six espacées de dix jours.

La maladie, déjà diagnostiquée, est bien installée. Les traitements n'existent pas, seuls les séjours en sanatorium peuvent être d'une certaine efficacité. Les vaccins contre la tuberculose ne sont encore qu’en tests à cette époque et ne sortiront effectivement que quelques années plus tard. Certainement, le médecin mène-t-il une tentative de la dernière chance. Il annonce sa venue en février : « Ce qu’il faut, pour bien faire, c’est que nous puissions gagner avril sans incident ; dès que notre bon soleil luira de nouveau, vous verrez comment les choses s’arrangeront ». Il conclut en saluant « Mme Thirel et le jeune homme ».

Le 2 mars 1920, la Commission de réforme d’Évreux propose le versement à Henri d’une pension temporaire à 100 %.

Le 10 avril 1920, c'est la maladie qui l'emporte. Henri décède à Breteuil, en son foyer auprès de son épouse et de son fils. Trois jours plus tard, il est inhumé, auprès de son père décédé deux ans auparavant, lors d’une cérémonie exclusivement civile. Le maire de la commune prononce au cimetière l’éloge funèbre du disparu.

L'action républicaine 24 avril 1920

Quand le monument aux morts de la Première Guerre mondiale est érigé dans ledit cimetière, quelques années plus tard, le nom d’Henri, même si celui-ci n'est pas reconnu "mort pour la France" par le Ministère de la guerre, est porté au côté de ses camarades de Tréon reconnus comme tels. Le 17 mars 1926, André Thirel, son fils, est adopté par la Nation.

Monument aux morts de Tréon (28)
 
Le Récit-de-vie

Il s'agit, dans un article unique, ou bien dans une suite d'articles, de raconter en la contextualisant, la vie d'un ancêtre, d'un collatéral, d'une famille, voire même d'un village ou d'une paroisse.


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25 de mai.
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La tuberculose et la grippe espagnole faisaient des ravages. Dans le cimetière que l'on voit derrière le monument aux morts, se trouve la tombe de mes arrière-arrière-grands-parents. J-C Leloup

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Alain THIREL-DAILLY
Alain THIREL-DAILLY
25 de mai.
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Mes AGPP, mes Grands-parents, mes parents et mes frères y reposent.

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Dans un autre registre, j'avais mis cette chanson de Craonne pour illustrer le parcours de mon grand père, elle a été confisquée par YouTube au bout d'un an ou deux... donc ne sois pas surpris si un jour elle disparait.

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Alain THIREL-DAILLY
Alain THIREL-DAILLY
25 de mai.
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on verra bien ;-)

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Quelque part il eut de la chance, un mien cousin, a contracté sa maladie à l'armée avant la declaration du conflit, il est passé de service militaire à mort en 1915, sans droit à la mention MPLF.

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Alain THIREL-DAILLY
Alain THIREL-DAILLY
25 de mai.
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Merci pour ta lecture attentive et tes commentaires !

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