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Récit de vie : Armand Klein (11) : la reconstruction personnelle

Si les affaires marchent bien pour les Klein, la perte de leur fils, tout aussi brutale qu’imprévue, a plongé le couple dans la peine. Sans doute, comme c’est souvent le cas à l’occasion d’un deuil, les liens familiaux se sont renforcés. Armand, qui n’a jamais eu de « vraie famille », indépendamment de l’amour qu’ont pu lui donner ses parents nourriciers, s’est attaché à la famille de son épouse qui le lui rend bien. Élisa, quant à elle, puise des ressources dans ses fortes convictions religieuses. Tout deux respectent la période de deuil dans la vie sociale, mais n’en restent pas moins investis, bien au contraire, dans leur vie professionnelle, leur seule source d’épanouissement à présent.

Chaque semaine, depuis le décès, ils se rendent au Père-Lachaise pour se recueillir sur la tombe de l’enfant perdu. Pour le premier anniversaire du décès, en avril 1889, ils organisent le traditionnel service religieux dit du « bout de l’an » en la mémoire de Louis. La famille, les amis, les relations des parents viennent les accompagner dans ce moment de passage et de reconstruction qui commence pour eux. Ceux qui n’ont pu faire le déplacement leur adressent un message d’amitié et d’encouragement.

L’engagement social

Élisa et Armand n’envisagent pas d’avoir d’autre enfant et choisissent de s’investir auprès de ceux d’amis, de collègues, de connaissances qu’ils accompagnent. Nous avons retrouvé un certain nombre de correspondances qu’ils entretiennent avec des filleuls, au plan religieux. En 1890, Armand devient, par exemple, le parrain d'Henriette Touret, dont la mère est également brocheuse. La corporation du livre est une grande famille dans laquelle les solidarités jouent pleinement, indépendamment du statut social.


Ils s’investissent également dans l’accompagnement professionnel de jeunes adressés par des connaissances qu’ils accueillent, logent, embauchent, forment. Ces liens et correspondances se poursuivront quand ces jeunes seront devenus adultes et parents à leur tour. Évariste Boulineau, par exemple, fils d’un négociant en vins de Châtellerault, embauché comme apprenti deviendra plus tard, à son tour brocheur à son compte et maintiendra le lien avec les Klein devenus amis de sa famille.

Correspondance au 19ème siècle
Échange avec les Boulineau

De nombreuses demandes d’aides d’urgence leur sont adressées et ils interviennent pour soutenir tel ou tel dans la difficulté. Armand conserve toutes ces demandes qui sont ainsi arrivées jusqu’à nous. Elles nous permettent d’éclairer la personnalité et l’engagement des Klein.

L’engagement « patriotique »

Au début des années 1890, une fédération des anciens combattants de 1870-1871 s’est constituée, dans le but de « revendiquer auprès des pouvoirs publics la création d’une médaille commémorative ». Cela ne saurait suffire à Armand et à ses amis, qui souhaitent une plus grande reconnaissance pour les leurs. Se comparant aux troupes coloniales, sans cesse glorifiées par le pouvoir actuel, ils se jugent les oubliés de la nation. C’est ainsi qu’est fondée la « Société des vétérans de terre et de mer 1870-1871 » dont Armand devient immédiatement membre. Avec ses camarades vétérans, ils mettront encore dix ans pour que celle-ci soit approuvée par le gouvernement.

Carte de Vétéran 1870-71
Carte de Vétéran Klein

Armand s’investit dans la section locale de son quartier qui se développe vite. Au départ société de secours mutuels puis caisse de retraite, cette fédération se propose « d’entretenir chez tous les Français qui ont été soldats, le culte de la patrie, celui du drapeau et l’idée de bonne camaraderie qu’ils doivent à la défense du pays tant qu’ils sont en état de porter les armes ». Elle possède, ensuite, son organe officiel de presse, Le Vétéran. Nous sommes encore clairement dans le traumatisme de la défaite de 1870. Malgré ses accents nationalistes et revanchards, la société reste constamment du côté de la République et sûrement même maintient-elle ainsi dans le giron républicain des adhérents qui auraient été tentés par d’autres aventures.

La vie continue et, désormais complément indispensable de sa vie professionnelle, l’engagement social d’Armand sera partie constituante de sa vie personnelle.

 
Le Récit-de-vie

Il s'agit, dans un article unique, ou bien dans une suite d'articles, de raconter en la contextualisant, la vie d'un ancêtre, d'un collatéral, d'une famille, voire même d'un village ou d'une paroisse.


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2 Comments

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J'ai encore appris quelque chose aujourd'hui . Cette association d'anciens combattants de la guerre de 1870 contre les Prussiens. Merci Alain.

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Merci Dominique. Je mettrai, à l'occasion, des archives sur cette asso dans la rubrique ad hoc du site. Bon séjour catalan.

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