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Photo du rédacteurAlain THIREL-DAILLY

Récit de vie : Armand Klein (12) rebondir face aux événements...

Voilà maintenant quinze ans qu’Eugène Monniot et Armand Klein, mon grand-père, sont associés comme brocheurs, sans que n’apparaisse nulle ombre au tableau. Le 11 mars 1892, ils se retrouvent chez Me Aubron, le notaire en charge de leurs affaires depuis le début. Ils s’accordent, sans difficulté, pour une prorogation de la société en nom commun pour un nouveau bail de quinze années. Quand arrivera l’heure de la prochaine prolongation, s’il y a, ils auront respectivement 67 et 60 ans. L'acte sera bientôt disponible à la rubrique archives de ce site.

Une société prorogée et une extension des sites d'activité

Les affaires marchent bien, à tel point qu’ils décident d’accroître le volume de leur activité. En même temps qu’ils signent la prorogation de leur partenariat, ils voient l’aboutissement d’un dossier sur lequel ils travaillaient depuis un moment. C’est pour de nouveaux locaux, rue Serpente, à proximité de leur siège de la rue des Poitevins, qu’ils signent un bail.

Plan d'un local rue Serpente, à Paris, fin 19e.

Monniot & Klein sont maintenant à la tête de trois ateliers à Paris, rue des Poitevins, rues Bezout et Dareau et rue Serpente et l'entreprise s'est bien agrandie.

L'incendie !

Quatre ans se sont passés et les trois sites fonctionnent à plein. En cette nuit du 26 au 27 juin 1896, Armand est brusquement tiré de son premier sommeil par la police. Un incendie gigantesque s’est déclaré vers une heure du matin dans l’atelier du quartier du petit Montrouge, dans le 14e. Le Préfet de Police Lépine, le commissaire Baissac et le conseiller municipal Bernard sont déjà sur place quand les deux associés les rejoignent. Les pompiers des casernes de Port-Royal, du Vieux-Colombier, de Plaisance, de la Cité sous les ordres du colonel Varigault équipés de cinq pompes à vapeur mettront plusieurs heures à maîtriser l’incendie. Des ateliers de brochage Monniot-Klein et de la fabrique de bâches Michelet, contiguë, il ne reste plus que papier calciné ou détrempé. Heureusement, les familles ouvrières logées à proximité ont été évacuées à temps et aucune perte humaine n’est à déplorer. Selon la presse (plus d'une dizaines d'articles trouvés, y compris dans la presse régionale), « le feu s’est développé avec une telle violence que les flammes montaient si haut dans le ciel que tout le sud de Paris était éclairé comme une colossale torchère ».

Les dégâts sont évalués, dans un premier temps, à plus de 50.000 frs et, surtout, ce sont, nous dit la presse, « plus de deux cents ouvrières et ouvriers qui se retrouvent au chômage forcé ». Nous imaginons que ce nombre d'ouvriers concerne tout autant la fabrique de bâches que l'entreprise de brochage, mais cela témoigne quand même de l'importance du site et de la société Klein et Monniot.

Coupure de presse : gigantesque incendie à Paris 14e en juin 1896.

Nous n’avons pas réussi à trouver, pas plus dans les archives publiques que dans celles de la famille, de documents permettant de savoir de manière certaine si l’activité de la société a pu reprendre sur ce site. Depuis le début du 19e, et la création de la première mutuelle incendie, en 1816, des évolutions sont intervenues dans le sens d’une meilleure couverture des risques. Les associés, si l'on en croit la presse, étaient bien couverts et l’activité a certainement pu reprendre, bien entendu après que les indemnisations aient permis de remettre en état les locaux. En toute hypothèse, dans la période de chômage forcé, les ouvriers, ont certainement vite retrouvé une embauche, en interne ou en externe, tant la profession a besoin de bras.

L'expropriation !

En cette fin 19e siècle, sous la baguette du Baron Haussmann, Paris est en pleine mutation. Ce dernier a lancé sa fameuse campagne « Paris embellie, Paris agrandie, Paris assainie ». Si son projet trouve des fondements, notamment, dans les conditions d’hygiène qui ont mené à l’épidémie de choléra de 1832 qui reste encore dans les esprits, ça n’enlève pas les objectifs moins médiatisés qu’Haussmann a fait valoir auprès de Napoléon III. Il faut, lui disait-il, « accepter dans une juste mesure la cherté des loyers et des vivres […] comme un auxiliaire utile pour défendre Paris contre l'invasion des ouvriers de la province ». Tout est dit !

Si Monniot et Klein ne sont pas parmi les plus défavorisés, ils feront quand même les frais de l’obsession de la ligne droite, aussi appelée « le culte de l’axe ». En cette année 1897, c’est leur atelier du 12 rue des Poitevins qui va faire les frais des démolitions pour le percement de la rue Danton. Une procédure d’utilité publique est bien sûr engagée durant laquelle chacune des parties est amenée à faire valoir ses droits. Le jugement d’expropriation est plaidé le 8 juillet 1897 et la décision est rendue le 14 novembre suivant.

MM Monniot et Klein, brocheurs, titulaires d’un bail de location courant encore durant 8 ans et 6 mois, pour un loyer de 1.750 frs, sollicitent une indemnité d’expropriation à hauteur de 100.425 frs. Le juge leur accordera une allocation de 40.000 frs.

BO de la Ville de Paris - Expropriations pour percement rue Danton

Un article du Bulletin de la presse du 11 août 1898 relate, de manière intéressante, comment « la pioche du démolisseur qui d'habitude à Paris frappe impartialement, semble cette année prise d’une fureur particulière pour les imprimeries »

Le Bulletion de la Presse 1898

Une nouvelle fois, les associés vont devoir rebondir pour maintenir leur activité, mais, soyons rassurés, ils ne manquent pas d’énergie pour mener ces combats. Et c’est ainsi que le 30 juin, 1898, M. Dol donne bail à la société Monniot & Klein pour un appartement au n° 60 de la rue St-André-des-Arts où l'entreprise établit son siège nouveau siège social. Armand et Élisa, désormais, résident dans cet appartement quand les Monniot sont installés au 12 rue Bezou, dans le 14e.


Les associés ont su passer les difficultés, la vie continue.

 
Le Récit-de-vie

Il s'agit, dans un article unique, ou bien dans une suite d'articles, de raconter en la contextualisant, la vie d'un ancêtre, d'un collatéral, d'une famille, voire même d'un village ou d'une paroisse.


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2 Comments

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On revit la grande époque des romans de presse, grâce à toi Alain !

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Euh, c'est beaucoup plus modeste 😉 Merci de ton intérêt

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